Voir ses premières aurores boréales est une expérience magique, et réussir à les prendre en photos vous permettra d’imortaliser le moment. Photographier des aurores boréales, c’est un peu un défi que vous vous lancez : il s’agit d’un phénomène naturel que vous ne pouvez pas vraiment prédire à l’avance, et vous devrez faire appel à vos connaissances en photo.
Dans cet article, je vous décris quelques notions à avoir, ainsi que le matériel nécessaire pour la prise de vue d’aurores boréales. Cela peut aussi s’appliquer à la photo d’aurores australes et à l’astrophotographie en général. La photographie d’aurores se fait par définition de nuit, et c’est là que vous allez pousser votre appareil à ses limites afin de capturer ces voiles colorés de faible intensité.
Petit point important avant d’aller plus loin. Si par hasard des aurores boréales apparaissaient dans le ciel à l’imprévu (si, si, c’est possible … ça m’est déjà arrivé au Canada) et que vous n’avez pas d’appareil photo avec vous mais un smartphone de qualité comme les derniers Huawei, vous pourrez tout de même faire de superbes photos en utilisant les réglages que je décris plus bas.
Le matériel
Commençons par les essentiels !
Il vous faut un bon boîtier (hybride ou DSLR) avec une carte mémoire vide et une batterie chargée à bloc, une lentille lumineuse et un trépied. A cela s’ajoute du petit matériel qui n’est pas indispensable mais qui vous permettra de tenir plus longtemps dans des températures glaciales. Quelle chance !
Le boîtier
Depuis un an et demi maintenant, j’utilise un Nikon D500, c’est un appareil APS-C assez haut de gamme qui a plusieurs détails pour la photo de nuit que j’apprécie, comme le cache oculaire intégré (j’explique un plus bas son intérêt), deux emplacements de stockage pour des cartes SD et XQD, une bonne résistance aux infiltrations d’eau et températures extrêmes, une montée en ISO plus qu’acceptable jusqu’à 6400 ou encore le rétro éclairage des touches et écran supérieur.
Pour faire des photos de très bonne qualité, il vous faudra investir dans un boîtier dernière génération hybride ou DSLR avec un capteur APS-C ou plein format, qui pourra donc vous donner une très bonne qualité d’image grâce à un capteur performant et une bonne gestion du bruit.
La carte mémoire et la batterie
J’utilise en tant que premier espace de stockage une carte XQD de 128 Go qui ne passe que sur peu de boîtiers, dont le D500, mais j’ai un deuxième espace de stockage pour des cartes SD(HC/XC).
La capacité et vitesse d’écriture de votre carte mémoire sont des paramètres très importants si vous shootez en RAW, chaque photo fera plusieurs dizaines de Mo contrairement à un JPEG qui sera dix fois plus léger.
Si vous êtes intéressé par les timelapses, vous risquez de vous confronter au problème que j’ai eu la première fois que j’ai photographié les aurores, il y a 3 ans. Ma carte mémoire n’avais pas une vitesse d’écriture suffisante. Lorsque j’ai lancé mon timelapse, j’ai remarqué que l’appareil n’avait pas le temps de transférer la photo avant la nouvelle prise de vue, et je me suis alors retrouvé bloqué sur la mémoire tampon de l’appareil, qui est de l’ordre de quelques photos. Pour éviter cela, j’ai dû augmenter l’intervalle entre deux photos (3 > 10 seconds), ce qui a donné un mauvais rendu en vidéo.
N’oubliez pas de vider votre carte tous les jours, ou d’en avoir plusieurs de capacité moyenne pour éviter certains problèmes. Dites-vous aussi que le froid va allonger considérablement la vitesse de transfert de vos photos. Je recommande d’avoir plusieurs cartes SD(HC/XC) de classe 10 (U1) minimum (vitesse d’écriture) avec une capacité de 16 ou 32 Go.
En ce qui concerne la batterie, j’utilise pour les timelapses un grip adapté au Nikon D500, le Pixel Vertax D17, qui me permet d’avoir deux batteries branchées en continu et me donne une capacité d’environ 1500-1800 photos. Je recommande d’avoir toujours une seconde batterie, et même une troisième si vous utilisez un hybride. Gardez-les au plus près du corps (poche intérieur de votre veste) pour éviter qu’elles ralentissent à cause du froid.
L’objectif
En règle générale, pour pouvoir capturer les aurores dans leur ensemble, il vous faut un objectif grand angle (24 mm ou moins en équivalent plein format) qui a une ouverture inférieure à 4, et idéalement proche de 2.8.
J’utilise le Tokina 11-16 mm qui a une ouverture constante de 2.8. C’est une bonne lentille à un prix abordable qui me convient pour l’usage que j’en ai. Elle a quelques defaults, comme des aberrations chromatiques et une netteté moindre à 2.8, surtout dans les angles, mais c’est en partie rattrapable sur Lightroom.
Une autre lentille intéressante est le Samyang 14 mm f/2.8, ou encore, en plus lumineux et toujours chez Samyang, le 16 mm f/2.0. Ces trois lentilles sont disponibles pour les DSLR avec les montures Canon, Nikon et Sony. Vous pouvez trouver d’autres lentilles de la même marque que votre appareil, mais elles seront certainement plus onéreuses et pas vraiment meilleures. C’est à vous de juger !
Petite remarque, votre lentille ne doit pas être obligatoirement motorisée (AF), vous allez shooter en manuel dans tous les cas.
Le trépied
J’ai opté il y a déjà plusieurs années pour le trépied Manfrotto Befree, il m’accompagne sur pas mal de voyages et il sera avec nous lors de notre tour du monde. Il est léger, facile à mettre en place et il a deux angulations des pieds qui permettent d’augmenter sa stabilité.
Je vous conseille d’investir dans un bon trépied, ou de vous en faire prêter un. Vous voulez être sûrs d’avoir un trépied stable qui peut résister au vent, sinon aucune de vos photos ne sera nette. Lorsque vous déployez les pieds, sortez les parties les plus épaisses en premier et évitez de le déployer dans sa totalité pour réduire sa prise au vent.
Accessoires utiles
Restez au chaud – Vous risquez d’avoir des températures autour de zéro et même une dizaine de dégrés dans le négatif. La première chose à ne pas oublier, c’est de se couvrir le corps, les jambes ainsi que toutes les extrémités car vous allez rester en position statique la plupart du temps ! Si vous portez des affaires de ski avec une première couche près du corps, ça fera très bien l’affaire. Prévoyez un thermos et de quoi grignoter si vous partez toute la soirée chasser les aurores boréales.
La lampe frontale – Prenez avec vous une lampe frontale, avec ou sans lumière rouge mais avec intensité variable et allumez-la seulement si besoin (installation de l’appareil). Vous pouvez vous retrouver tout seul sur un spot photo, mais si vous êtes plusieurs vous allez rapidement haïr la personne qui pointe sa lumière blanche vers vous et votre appareil, et qui gâche vos photos.
Le déclencheur à distance – Pour diminuer au maximum les vibrations sur l’appareil et être flexible dans les paramètres de prise de vue, je me suis procuré un déclencheur à distance sans fil qui a deux options qui m’intéressent, le timelapse et la fonction BULB. Ces deux options sont aussi sur l’appareil mais pour y accéder vous devez soit naviguer à travers le menu ou garder le doigt sur l’appareil.
La fonction timelapse est très simple à utiliser, directement depuis la télécommande vous pouvez régler la durée de la photo, l’intervalle entre deux prises de vue et le nombre total de photos à prendre. La fonction BULB, quant à elle, permet de garder l’obturateur ouvert tant que vous gardez votre doigt sur le déclencheur. En gérant le déclencheur depuis la télécommande, vous n’introduisez pas de vibrations lors de la prise de la photo (l’appareil doit être mis en fonction BULB aussi) et vous pouvez suivre le temps d’ouverture de l’obturateur. Je privilégie le fonction BULB au déclenchement normal.
Pour aller avec le Nikon D500, j’ai acheté le Pixel TW-283, une fois fixé dessus et ma composition faites je n’ai plus besoin de toucher mon appareil, je n’ai plus qu’à attendre les aurores ! Si vous n’avez pas de déclencheur à distance, pas de problème, utilisez l’option retardateur de l’appareil photo pour éviter les vibrations.
Le cache oculaire – Le cache oculaire est un tout petit accessoire souvent fait de plastique qui va se placer à l’arrière de l’appareil sur l’oculaire du viseur. Vous le trouvez souvent vendu avec votre DLSR parce qu’il a un viseur optique.
Lors de la prise vue en exposition longue, la lumière qui se trouve dos à l’appareil (un lampadaire, votre frontale, phares de voiture) va pouvoir passer par l’oculaire et jouer sur l’exposition de votre photo en atteignant le capteur. Au mieux votre photo sera un peu surexposée, au pire vous pourrez observer des raies de lumière qui apparaîtront violettes.
Les appareils hybrides n’ont pas besoin de cache oculaire car ils ont une visée électronique. La lumière qui rentre par l’oculaire ne peut pas accéder au capteur.
Les réglages
Passons maintenant au cœur du sujet, les paramètres de prise de vue !
Vous aurez beau avoir le meilleur matériel au monde, si vous ne savez pas quels réglages utiliser, vous aurez du mal à capturer les aurores telles que vous les voyez.
Les aurores boréales se forment vers le pôle Nord magnétique. Avant de planifier une sortie photo, allez repérer les lieux en journée et trouvez des points de vue qui sont orientés plein Nord ou d’Est en Ouest. Si vous êtes à Tromsø en Norvège, on vous liste tous nos meilleurs spots photo ici !
La préparation
Avant de sortir dans le froid, restez au chaud et faites ces premiers réglages :
- Passez la qualité des photos en RAW si vous souhaitez faire de la post-production
- Mettez votre objectif en mode manuel ainsi que votre boitier (Mode M)
- Désactivez le flash
- Allez dans le menu et désactivez la réduction de bruit en ISO élevés ainsi qu’en exposition longue (vous ferrez ça vous même en post-production si vous le souhaitez)
- Désactivez la stabilisation optique de votre objectif et appareil photo pour éviter les micro vibrations (si équipé)
- Réglez la balance des blancs sur 5000K (lumière neutre) ou lumière du jour et non pas sur automatique. Si vous décidez de prendre des photos en JPEG avec une balance des blancs en auto, vous allez certainement vous retrouvez avec des blancs qui changent entre les photos
- Ajoutez le cache oculaire pour les DSLR
- Connectez le récepteur du déclencheur à distance et vérifiez que celui-ci fonctionne
Focus Automatique à l’infini Focus Manuel à l’infini
Une fois sur place avec l’appareil fixé sur son trépied, réglez votre ouverture sur la minimale possible (f/2.8-4), mettez vous en grand angle (16-24 mm) et faites le focus à l’infini (∞) sur votre objectif. Placez ensuite la visée sur l’écran (Live View) et augmentez les ISO à 10 000 et prenez une photo sur quelques secondes.
Avec cette première photo assez lumineuse (et pleine de bruit ISO), vous allez pouvoir ajuster la mise au point (autour de l’infini), pour avoir une image nette du premier au dernier plan, et arranger votre composition. Répétez cette photo jusqu’à trouver la mise au point et composition idéale.
Pendant la prise de vue
Une fois les réglages terminés et prêt à photographier les aurores boréales, pensez que vous allez devoir ajuster le couple vitesse / ISO en fonction de leur intensité et vitesse de mouvement.
Par défaut, utilisez les paramètres suivant : f/2.8, vitesse 15 secondes, ISO 2000. Si les aurores sont plutôt diffuses, augmentez la vitesse à 20-25 secondes. En revanche, si elles sont rapides et intenses par la même occasion, passez sur une vitesse de l’ordre de quelques secondes (3-8 sec) mais augmentez les ISO à 4000-6400 si besoin.
Pour finir, une dernière notion à garder en tête, est la règle des 500. Cette règle définit la durée maximale d’exposition avant que la rotation de la terre ne soit visible sur vos photos. Les étoiles vont alors commencer à former une trainée. Elle se calcule comme ceci :
Vitesse maximale d’exposition = 500 / longueur focale utilisé (équivalent plein format)
ISO 800 – 21 sec – f/2.8
ISO 2500 – 3 sec – f/2.8
Vous avez maintenant toutes les clés en main pour photographier vos premières aurores boréales !
Profitez du spectacle et partagez vos photos ou conseils en commentaire !
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